Le Kenyan Eliud Kipchoge, ancien recordman du monde du marathon, a récemment raconté avoir subi une vague de cyber harcèlement et des menaces, après le décès accidentel de son compatriote, Kelvin Kiptum, qui avait battu son record, en février. Des internautes l’accusent d’avoir prémédité la mort de Kiptum, par vengeance.
« J’étais choqué que les gens disent sur les réseaux sociaux que j’étais impliqué dans la mort de ce garçon », a-t-il confié dans un entretien à BBC Sport Africa.
J’ai reçu beaucoup de menaces : qu’ils allaient brûler le camp (d’entraînement), qu’ils allaient brûler mes investissements en ville, ma maison, ma famille. Ça ne s’est pas produit, mais le monde est ainsi,
a-t-il ajouté.
En plus, le sportif annonce avoir perdu 90 % de ses amis depuis la mort de Kiptum, à cause de ces abus en ligne.
C’était vraiment douloureux d’apprendre que mes proches, mes camarades d’entraînement, ceux avec qui je suis en contact, avaient des mauvais mots envers moi. J’ai appris que l’amitié ne dure pas pour toujours, poursuit-il. Ce qui s’est passé m’a amené à ne faire confiance à personne. Je ne fais même plus confiance à ma propre ombre,
explique-t-il.
Un impact sur ses performances aux JO Paris 2024 ?
La légende du marathon pense que ces abus sur les réseaux sociaux ont affecté ses performances en compétition. Il avait en effet terminé 10e sur le marathon de Tokyo, le 3 mars dernier, son plus bas classement depuis ses débuts en 2013, franchissant la ligne d’arrivée avec plus de deux minutes et demie de retard sur le vainqueur Benson Kipruto. « Quand j’étais à Tokyo, j’ai passé trois jours sans dormir », a-t-il révélé. « C’était la pire position que je n’ai jamais eue. »
Pas de quoi lui faire tirer un trait sur ces rêves de triplé olympique, ce qui n’a encore jamais été fait. « Il s’agit de se relever et d’aller tout droit vers son objectif. Je veux entrer dans les livres d’histoire, être le premier être humain à gagner consécutivement», affirme-t-il.
Malgré les turpitudes actuelles, il demeure toujours difficile de relater à la perfection l’époustouflant marathon réalisé en moins de deux heures par Eliud Kipchoge en octobre 2019. En effet, à l’instar de l’athlète britannique Roger Bannister, qui avait parcouru un mile en quatre minutes en 1954, le Kényan a orchestré un exploit qui, pour beaucoup, se heurtait aux limites du physique humain.
Il est aujourd’hui le seul homme à avoir couvert les 42,195 km en moins de deux heures, lors de cette course qui était néanmoins non homologuée. « Je veux inspirer beaucoup de gens, montrer qu’aucun être humain n’est limité », s’exprimait-il devant les médias.
Aujourd’hui, Kipchoge est considéré comme le plus grand marathonien de tous les temps. Il a ainsi remporté tous les marathons auxquels il a participé, dont ceux des Jeux Olympiques de Rio 2016 et Tokyo 2020, ainsi que huit marathons majeurs de Londres, Chicago et Berlin. Il détient également le record du monde du marathon en compétition: son temps super-sonique de 2:01:39 enregistré au marathon de Berlin 2018 faisait tomber d’une minute et 18 secondes le record précédent. Un record qui sera battu par son compatriote Kelvin Kiptum, en 2 h 35 s contre 2:01:09, à Berlin, en 2022.
L’Europe, rêve d’antan
Né dans le district de Nandi au Kenya, il court au plus haut-niveau depuis 2002. Au cours de la première partie de sa carrière, il était même spécialiste du 5000m, une distance sur laquelle il a remporté la médaille de bronze des Jeux Olympiques d’Athènes 2004 et celle d’argent de Beijing 2008. En se lançant dans l’athlétisme au début des années 2000, le jeune Eliud Kipchoge voulait « simplement prendre l’avion et aller en Europe ». Vingt-deux ans plus tard, c’est une légende vivante du marathon qui arrive à Paris pour des JO aux airs d’ultime défi.
Avec sa foulée ample et métronomique, il a battu le record du monde du marathon en 2018 et en 2022. Au total, Kipchoge a remporté 16 des 20 marathons officiels qu’il a courus depuis 2013 avec, outre ses deux titres olympiques (2016 et 2021), 11 victoires sur les majeurs (5 à Berlin, 4 à Londres, 1 à Tokyo et à Chicago). À 39 ans, le Kényan marié et père de trois enfants veut écrire l’histoire à Paris, en devenant le tout premier marathonien à obtenir trois fois de suite l’or olympique, dépassant l’Éthiopien Abebe Bikila (1960 et 1964) et l’Allemand Waldemar Cierpinski (1976 et 1980).