Joueur surdoué, Samuel Eto’o a construit sa notoriété en pratiquant pendant près d’un quart de siècle le sport le plus populaire du monde. Son aura aidant, il est très souvent invité par de nombreux chefs d’Etats. De Nelson Mandela à Vladimir Poutine, en passant par le Pape François qui a béni son mariage le 14 juin 2016, en la paroisse San Giovanni Battista en Italie, Samuel Eto’o évolue depuis belle lurette dans la cour des hommes les plus puissants de ce monde.
Pourtant, Samuel Eto’o c’est l’histoire d’un homme issu de famille modeste, qui a grandi dans les quartiers difficiles de Mvog-Ada, à Yaoundé, la capitale politique du Cameroun, et surtout New-Bell, à Douala, la métropole économique. Les conditions de vie précaire auxquelles il fait face durant son enfance vont contribuer à forger le caractère de ce génie, visiblement né avec un ballon de football. Au fil des années, son talent précoce va faire de l’ancien élève du Lycée Mongo Joseph une star mondiale. Des victoires dans sa vie, il en n’a accumulé, notamment sur les terrains de football. Ce qui lui aura permis d’avoir le plus riche palmarès pour un footballeur africain !

Samuel Eto’o Fils a remporté les Jeux olympiques (2000) et deux Coupes d’Afrique des nations (2000, 2002) avec le Cameroun, compétition dont il est le meilleur buteur historique (18 réalisations). Il a disputé quatre phases finales de Coupe du monde, 1998, 2002, 2010 et 2014, et est élu quatre fois par la Confédération africaine de football (Caf) joueur africain de l’année, (record codétenu avec l’Ivoirien Yaya Touré).
En club, le triple champion d’Espagne avec le Barça a soulevé trois Ligues des champions, dont deux avec le FC Barcelone (2006, 2009) et une avec l’Inter Milan de José Mourinho (2010). Il participe à l’âge d’or du Barça en 2009, année au cours de laquelle les Blaugranas remportent les six titres possibles. Il est élu 3e meilleur joueur Fifa, en 2006 et 2009, aux côtés de Messi et Ronaldinho. Si le Cameroun avait participé au Mondial allemand de 2006, Samuel Eto’o, meilleur buteur de la Liga cette année-là, aurait pu être un candidat sérieux pour le prestigieux titre de Ballon d’Or France Football, où il a fini 6e.
Au-delà de ses exploits sportifs, Samuel Eto’o a toujours été engagé dans diverses causes. Il s’est notamment engagé dans la lutte contre le racisme. Plusieurs fois insulté dans les stades à cause de la couleur de sa peau, l’ancien attaquant du Fc Barcelone a posé des actes forts contre toutes formes de discriminations. Ce qui l’a aidé à rester une figure inspirante. La carrière de Samuel Eto’o a laissé une marque indélébile dans l’histoire du football mondial. Sa longévité au plus haut niveau, sa discipline et sa constance ont fait de lui un modèle pour les jeunes du monde entier. Non seulement il excellé dans ses propres performances, mais il a également inspiré les générations futures a repoussé leurs limites et à viser l’excellence.
Même après sa retraite sportive, Samuel Eto’o continue d’être une voix influente du football et au-delà. Son héritage est celui d’un grand champion, qui a défini ce que signifiait être meilleur, prouvant que la détermination et la passion peuvent transformer le sport et la vie.
L’apprenti footballeur de l’Ecole de football des Brasseries du Cameroun (cuvée 1994) connaît ensuite une fin de carrière de globe-trotter, avec des choix parfois étonnants. Successivement, il s’en ira en Russie au sein du club tchétchène de l’Anji Makhatchkala ; en Angleterre où il retrouve Mourinho à Chelsea, avant d’aller à Everton ; en Italie pour une pige à la Sampdoria de Gênes ; puis en Turquie (Antalyaspor -entraîneur-joueur- et Konyaspor) ; et enfin au Qatar SC. Au total, tout au long de sa carrière, Eto’o a marqué 359 buts en disputant 718 matchs toutes compétitions de clubs confondues, et compte 118 sélections (56 buts, record en équipe nationale) avec l’équipe nationale du Cameroun.

Pendant son capitanat au sein des Lions indomptables, et même après la fin de sa carrière, il a souvent usé de son influence pour faire passer ses envies. Il a aussi parfois eu maille à partir avec certains dirigeants ou sélectionneurs. En effet, Samuel Eto’o est un homme très charismatique, sûr de lui, au franc-parler bien trempé. Début 2019, il lâchait par exemple :
Il y a beaucoup de corruption en Afrique. L’argent donné par la CAF et par la Fifa doit être dépensé pour les infrastructures et pour ceux qui font le spectacle.
A la fin de sa carrière, celui qui rêvait d’embrasser le métier d’entraîneur (il avait d’ailleurs commencé à passer ses diplômes) a choisi d’œuvrer dans l’ombre du malgache Ahmad Ahmad, qu’il a contribué à hisser au sommet de la Caf, au détriment de son compatriote Issa Hayatou. Dans sa collaboration avec le président de l’instance faitière du football africain, il a comme mission officielle « chargé des relations avec les fédérations et les confédérations », avait-il précisé. Un rôle aux atours franchement politiques pour le début de la nouvelle vie du Lion indomptable.

Combattant
De cette posture, il va jouer un grand rôle pour que la Can 2019 ne soit pas retirée au Cameroun, pour impréparation, comme le prévoient les statuts de la Caf. On assiste alors à ce que Paul Biya avait appelé « un glissement de date » pour 2021. Un coup réussi par le « Pichichi » (désignation du meilleur buteur de la Liga) qui va lui permettre de parler à nouveau à l’oreille du président de la République.
Ceci, après que les relations entre les deux hommes se soient refroidies à cause de son refus de prendre le drapeau national à la veille du départ pour le Mondial brésilien de 2014. Pour cet acte anti patriotique, le président du Comité de normalisation de la Fécafoot de l’époque, Joseph Owona, de regretté mémoire, avait demandé, en vain, son exclusion de l’équipe nationale.
Samuel Eto’o, en se créant très souvent des adversaires, mène en permanence une vie de combattant. L’ambassadeur de Brussels Airlines semble se nourrir de l’adversité. Son règne à la tête de la Fécafoot, depuis le 11 décembre 2021, en est une parfaite illustration. Dès sa prise de fonction, il a influencé la chute du sélectionneur Antonio Conceiçao, contre l’avis du ministre en charge des Sports, Narcisse Mouelle Kombi ; il a rompu de manière unilatérale le contrat de l’équipementier Le Coq Sportif ; refusé de restaurer la Ligue de football professionnel dans ses droits, etc. En juin 2023, il prend un pari risqué en devenant l’ambassadeur du géant des paris sportifs, 1XBet.
Election présidentielle
A l’opposé, il a réussi à trouver un consensus avec l’Assemblée générale de la Fécafoot de 2009, qui a pendant longtemps rendu ses prédécesseurs illégitimes ; ramené le public dans les stades ; rétabli le prix du Ballon d’or camerounais ; et fait payer régulièrement les joueurs, bien que sur la scène internationale, les sélections nationales, toutes catégories confondues, fassent piètre figure. Il a surtout pesé de tout son poids pour que la Can camerounaise ne soit pas repoussée, en raison du Covid.
Véritable idole dans son pays, Samuel Eto’o, ancien pensionnaire de la Kadji Sport Academy (1995-1997), a touché le cœur des Camerounais et Africains en marquant de nombreux buts, mais il a aussi, en homme généreux, contribué, à travers la fondation qui porte son nom, donner une vie meilleure à de nombreuses personnes au Cameroun et au-delà. En épousant la Franco-ivoirienne Georgette, l’une des mères de ses multiples enfants, il a fait décupler sa côte de popularité en Côte d’Ivoire.

Si Samuel Eto’o a échoué dans les affaires à travers notamment son entreprise SetMobile, on retient néanmoins de lui que son défunt centre de formation, Fundesport, déclaré d’utilité publique par décret présidentiel, aura, en peu de temps, produit des joueurs comme André Onana, Fabrice Ondoa, Fabrice Olinga, Wilfrid Kaptoum, Jean Marie Dongou, Lionel Enguené, Gaël Etock, et bien d’autres.
Du fait de son aura, tous les faits et gestes de Samuel Eto’o sont scrutés au quotidien par une presse avide de scoop. Les Editions Du Schabel lui ont déjà consacré quatre ouvrages : « Programmé pour échouer », « la Tragédie des Lions Indomptables » et « l’Arnaque », sous la plume du journaliste-écrivain Jean Bruno Tagne, son directeur de campagne lors de l’élection à la présidence de la Fécafoot ; puis « Samuel Eto’o : L’ange et les démons », écrit par Hiondi Nkam IV. Son ex-compagne, Nathalie Koa, avait également commis un livre, « Revenge Porn », qui avait été censuré. Mieux, une bande dessinée de Joëlle Esso des Editions Dagan retrace la vie de ce footballeur exceptionnel.
Du fait de son entregent et sa popularité, beaucoup lui prête des visées pour la magistrature suprême au Cameroun, un peu comme George Weah au Liberia. Mais, l’outrecuidant Samuel Eto’o, en bon stratège, a jusqu’ici écarté toute ambition politique.